Les missions de paix en crise : une question de légitimité, d’efficacité, de résistance, de coopération?

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Par Sous la direction de Bruno Charbonneau et Véronique Pronovost
Chaire Raoul-Dandurand en études stratégiques et diplomatiques | UQAM

Les missions de paix et les interventions humanitaires internationales ont été exposées à toutes les critiques. Lorsque la communauté internationale n'intervient pas, comme en Syrie, plusieurs se lèvent et invoquent une responsabilité à protéger les populations menacées et souffrantes. Lorsqu'une intervention est mise en place, comme au Mali, les objectifs, les acteurs qui interviennent et les modalités d'intervention sont sévèrement jugés. Les interventions non militaires n'échappent pas à la critique. Les actions de plusieurs organismes non gouvernementaux et organisations internationales qui travaillent dans le monde humanitaire demeurent teintées, selon certains, d'un paternalisme aux effets contreproductifs.

Dans un contexte où autant l'usage de la force militaire que les autres formes non militaires de l'intervention humanitaire sont sérieusement remises question, plusieurs chercheurs parlent formellement d'une crise. Les expériences en Afghanistan et en Irak ont démontré les contradictions, les ambiguïtés et les effets souvent contreproductifs d'un modèle de mission qui imbrique les techniques de sécurité et de développement. Dans des contextes de missions de paix plus « traditionnelles », comme en Bosnie, Côte d'Ivoire, Haïti ou Timor-Lieste, les exemples sont nombreux de protestation, de contestation et de résistance des populations locales face à la présence d'acteurs internationaux de l'humanitaire. Certainement, tant dans la pratique dans les débats scientifiques, plusieurs soulignent les multiples et divers signes d'une crise du modèle dominant de la « paix libérale » qui structure les missions de paix.

Les débats autour des missions de paix et de l'intervention humanitaire attisent les passions, surtout dans les espaces où sont déployées ces missions. Toutefois, ces débats demeurent très théoriques et souvent axés sur la nature libérale (ou non) des missions, n'identifiant pas la nature précise de la crise. S'agit-il d'une crise de légitimité, d'un questionnement sur l'efficacité et la capacité des missions à promouvoir la paix et répondre aux crises humanitaires, ou des symptômes du dysfonctionnement des formes multilatérales de coopération internationale? Les enjeux que soulèvent ces questions sont significatifs, car, entre autres choses, elles interrogent la possibilité même des pratiques humanitaires internationales à promouvoir la paix. La question de la crise se pose directement sur les sites où sont déployées les missions, car ce sont dans ces endroits où l'on aperçoit les activités locales de résistance, d'opposition et de négociation visant les interventions humanitaires internationales. Que signifient les signes de résistance et d'opposition aux opérations et missions de paix? D'où vient cette résistance? Comment les acteurs locaux négocient-ils les conditions et les modalités des missions de paix et des opérations humanitaires?

Les défis sont donc grands, tant dans leur dimension scientifique que dans la dimension pratique et appliquée. Ce colloque discutera de ces questions grâce à l'analyse de cas précis d'opérations de paix, notamment les cas de la Bosnie-Herzégovine, de la Côte d'Ivoire, du Mali et de la République démocratique du Congo. Les participants mettront également un accent particulier sur les relations et les interactions entre les acteurs locaux (c'est-à-dire les habitants de l'espace d'intervention) et les acteurs internationaux (les militaires, les humanitaires, les organisations internationales, etc.).

Actes des ateliers internationaux du 6-7 mai 2013
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